La marque du web

La presse peut-elle tout se permettre pour gagner de l’argent ?

Supersodomie à domicile. Carte visa acceptée. On en a l’eau à la bouche ! Voici le genre d’annonce « suggestive » diffusée dans les quotidiens espagnols. C’est un article du Libé du 28 novembre, qui dénonce cet état de fait, chiffres à l’appui. Un marché très lucratif ! La Razon publie ainsi 91 annonces de ce genre par jour, El Mundo 672, El Pais 702… Normal me direz-vous puisque la péninsule ibérique est le pays où, avec l’Allemagne, le marché de la prostitution est le plus important (350 000 filles de joies !). Pour El Pais, ce marché représenterait jusqu’à 5 Millions d’euros annuels. Libertine et vénale, cette presse espagnole n’est décidément pas bonne à mettre entre toutes les mains ! Espérons que le mouvement ne pervertira pas la PQN française !

Quand la Presse est reconnue d’utilité publique…

A quoi sert la presse ? A informer. A alerter. A divertir. Et aussi à aider, tout simplement. Pour preuve, l’initiative de Pédagogies Magazine, auteur du site aucoeursdesecoles.com. Sur ce portail les parents sont invités à donner leur avis sur l’établissement de leurs enfants. Une rubrique palmarès vous indique la note attribuée à l’établissement que vous sélectionnez. Une rubrique actualités délivre aussi les dernières informations liées au secteur de l’enseignement.

Un blog fait également réagir des parents sur des sujets qui les touche. Exemple, en ce moment, le thème est le suivant : pour ou contre les notes sur les bulletins scolaires ? Les avis affluent et comparent même avec les autres pays. Bilan : le site internet fournit des indications précieuses non seulement sur quelques 48 000 écoles françaises mais aussi plus généralement sur l’enseignement.

Le Monde vendu aux enchères !

le Monde va mal ! Il en est réduit... à vendre sa homepage sur eBay. C'est annoncé dans le numéro du mardi 17 juin : mise aux enchères de la homepage du site pour la journée du 30 juin, c'est-à-dire le lendemain de la finale de l'Euro de football. A mon avis, c'est une mauvaise idée.

Primo, le quotidien n'est pas un journal de sport. Donc se lier autant à une manifestation sportive ne colle pas à son image.

Secundo, se vendre aux enchères n'est guère valorisant, encore moins encore une fois pour le Monde.

Tertio, le quotidien ne trouve décidément pas beaucoup d'idées pour sortir de son ornière (baisse de diffusion, dettes, même si il faut reconnaître que son site se porte lui plutôt bien)... A l'opposé, on peut saluer les initiatives de Libé, qui regorge lui d'idées : numéro gratuit, une célébrité rédactrice en chef d'un jour, une rubrique making of très intéressante qui renoue avec l'esprit du Libé d'origine etc.

Allez Le Monde un petit effort !

Les journaux, devenus des marques médias, changent de modèle

Un excellent résumé se trouve dans un article rédigé le 12 mars 2008 par Newzy. Le journaliste, Eric le Braz, explique ainsi comment les marques médias réinventent de nouveaux modèles économiques. Avec moults exemples à l’appui, dont le sien.  Newzy  fait en effet partie de ces acteurs presse en pleine évolution, avec un mensuel papier gratuit dont la diffusion est ultra-ciblée, des magazines payants thématiques et deux sites web, l’un où les journalistes côtoient les contributeurs (newzy.fr) et l’autre plus axé sur les services (newzy executive). D’autres, en revanche, se cherchent. Et pour aller plus vite, ils rachètent des sites comme aufeminin (repris par Springer) ou Doctissimo (repris par Lagardère). Ils acquièrent ainsi, très cher, de l’audience et du service. Un modèle de marque média qui prend de plus en plus d’ampleur. Mais qui consomme de moins en moins de journaliste…

Pourquoi est-ce qu’il faut lire Bakchich, Rue89 ou Mediapart ?

Primo, parce qu’on y trouve des infos qui ne figurent nulle part ailleurs.

La preuve, j'ai appris

-sur Mediapart : que la commission pour l'égalité de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) a rendu public, le 18 mars, un rapport invitant tous les Etats-membres à dépénaliser l'avortement. Le rapport mentionne explicitement les pays membres du Conseil de l'Europe qui n'ont pas encore appliqué cette disposition dans leur législation nationale : Andorre, Malte, Pologne, Monaco et Irlande !

- sur Rue89 : que la commission du fonds d’aide à la modernisation de la presse écrite, distribue ses millions aux sites des journaux mais pas aux sites d’informations indépendants : 1 M€ pour le site du Monde, 400 000 € pour celui de Libé etc. Mais rien pour Bakchich, rue89…

Alors que ces équipes ne bénéficient pas du soutien logistique des médias existants et sont la plupart du temps, dirigés par des journalistes chevronnés issus de ces mêmes titres et qu’ils ont investi leurs deniers dans l’aventure ! Et pour l’anecdote, c’est l’un des fondateurs de Bakchich qui a écrit cette chronique sur le site concurrent, Rue89. Cela non plus on ne le voit pas ailleurs !

Et sur Bakchich : des infos inédites à la pelle :

- la face cachée d’Airy Routier. Edifiant !

- La liste des journalistes candidats cette année dans la bataille des municipales

Deuxio, il faut lire ces sites parce qu’ils nous donne de la culture (ça paraît naïf, je ne sais pas comment le dire autrement ;)). Ainsi, Mediapart nous met à disposition des livres, qui ponctuent leurs articles ! Suffit de télécharger.

Tertio, parce que ce sont tout simplement des supers pros qui rédigent. Qui ont compris les évolutions du métier de journaliste. Illustration avec Pierre Haski, Rue 89 (ex correspondant de Libé à Pékin), qui explique que  c'est à travers le témoignage d'un touriste-blogueur, Aurélien, qu'il a lui-même compris une des composantes importantes des émeutes du Tibet, la dimension nationale.

Quatro, parce qu'ils acceptent la critique beaucoup plus facilement que les médias traditionnels, allant jusqu'à se "critiquer" en interne. Exemple avec le dernier coup de gueule de Bakchich, sur Marianne, qui oppose deux rédacteurs en interne.

Bref, je pourrais poursuivre cette liste, mais vous m’avez compris : pour s’informer maintenant, il faut surfer ! Et s’abonner ;)

Marque de presse ou marque de mode ? Journal ou pas journal ?

Marie Claire Maison : 2 212 000 lectrices (+1.3%), Marie Claire Idées : 2 305  000 lectrices (+3%), Marie Claire : 2 502 000 (+0.7%)… Marie-Claire marche plutôt pas mal quand on voit la progression de son audience. De plus en plus de lecteurs, une notoriété qui va croissant, y compris hors de l’hexagone, que souhaiter de plus alors pour Marie-Claire ? Des licences. Bijoux, chaussures, accessoires, maroquinerie… tout peut être commercialisé sous la marque Marie-Claire. La preuve, cette diversification est pratiquée depuis 1982, au Japon, où Marie-Claire est devenue une vraie marque de mode. Les petites japonaises s’habillent Marie-Claire, s’équipent Marie-Claire, elles ne mangent pas encore Marie-Claire, mais ça ne saurait tarder. Un vrai phénomène d’identification à la marque est en train de s’opérer. Pas moins de 67 gammes de produits sont ainsi proposés sous licence Marie-Claire au pays du soleil-levant (pour un chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 250 M€). Fort de ce succès, le groupe de presse cherche désormais à conquérir l’Europe. Moi, je ne lis pas Marie-Claire, mais je suis une fidèle lectrice du Canard Enchaîné. Est-ce que je me vois pour autant avec des lunettes estampillées « mon canard » ? Heu, non vraiment pas. Là, ça ne marche pas. Est-ce que cela veut dire que le journal satirique n’est pas une belle marque ? Que si ! Et de belle notoriété aussi. Alors ? Que Marie-Claire n’est peut-être pas vraiment un journal ? Peut-être.

Affichage : 20 Minutes s’oppose au Monde

J’aimerais bien avoir l’avis du décrypteur de pub Joe La Pompe sur deux publicités de journaux, qui se renvoient la balle ; d’un côté, le gratuit 20 Minutes qui affiche son résultat Epiq : premier quotidien lu (2 526 00 d'audience, + 4,3 %), devant Metro, l'Equipe et le Monde (+ 7,1% d'audience, à 2 030 000 lecteurs au numéro). De l’autre, Le Monde justement, qui affiche aussi son résultat Epiq : 1ère « marque » (en additionnant le quotidien, le magazine Le Monde 2, et le site Internet) de « presse quotidienne généraliste » en audience auprès de 15 ans et plus. Deux visuels bleus, avec du texte et les deux se disent leaders. Votre avis ? Et si Joe veut nous éclairer… Je vous mets le lien pour lire l'article d'@si (j'ai droit à un par semaine, je vous le rappelle).

NRC Next, le nouveau modèle de la presse quotidienne ?

Un journal papier qui détient également un site internet : quelle organisation ? Quelle mutualisation des ressources ? Comment capter une clientèle complémentaire ? Beaucoup de questions que se posent les groupes de presse aujourd’hui, avec les péripéties que l’on connaît. Une marque semble avoir trouvé un modèle intéressant : le groupe hollandais NRC. Celui-ci, qui édite déjà NRC Handelsblat, a  ainsi préféré créer un autre journal que d'essayer de rajeunir l'existant. Et NRC Next est né, en mars 2006. Tabloïd du matin, il part du principe que ses lecteurs ont déjà appris les nouvelles auprès des autres canaux d’information. En conséquence, il propose des informations d’arrière-plan, des analyses et des articles d’opinion et ne paraît que trois jours par semaine. Sa cible : les 20/35 ans. La stratégie internet n'a pas été oubliée. Le quotidien possède en effet, en complément, son site web d’information continue, sur lequel la participation des lecteurs est encouragée. Egalement, s'ils désirent des infos supplémentaires sur un sujet qu'ils ont lu dans le journal, les lecteurs peuvent commander, grâce à un code et par SMS, un complément d'information.

Le Monde sans Minc

Le Monde : une marque magnifique, qui devrait être la marque française ! Avant, quand on voyageait, Le Monde rayonnait partout à l’étranger. Le meilleur des meilleurs journaux ! Aujourd’hui, bon courage pour le trouver, et encore, vous ne le récupérez qu’en photocopies de mauvaise qualité parfois. Exemple au Brésil ! Que s’est-il passé ?

J’ai souvenir d’un cours donné à l’IFP par Edwy Plenel, qui nous avait expliqué « la genèse » du Monde. Hubert-Beuve Méry, son fondateur voulait exclusivement le meilleur dans chaque spécialité pour officer au Monde. Le numéro un en politique, en géopolitique, en culture… Les meilleurs journalistes fabriquaient ainsi le meilleur journal. Egalement, dans son idée du journalisme, Hubert-Beuve Méry défendait l’idée d’un « journal loin de l’industrie ».  Et puis Alain Minc, Ancien directeur financier de Saint-Gobain, ancien PDG d’Air Industrie … mais aussi énarque, major de sa promotion, qui a fait Les Mines… est arrivé. Un hypercapitaliste. Sa fonction : trouver des capitaux. Des actionnaires. Gérer. Et le Monde décline. Je fais un raccourci rapide, mais il y a un peu de vrai non ?  Alors les journalistes se rebellent. Luciano Bosio, patron de Publiprint (régie d’un concurrent, le Figaro), l’expert de la presse en France,  s’en étonne sur son blog : « si ses journalistes (du Monde, ndlr) veulent l’empêcher de dépasser le stade des psychodrames pour envisager sérieusement le développement de son potentiel de marque, pourrait-on dire, tant mieux pour nous ! », écrit-il.  Potentiel de marque ! C’est vrai que le Figaro pourrait, après les montres, les stylos, … bientôt se mettre à vendre des haricots en boîte pour développer son potentiel de marque ! Si la société des rédacteurs du Monde (jetez un coup d'oeil sur le site du dessinateur du Monde, Plantu) ne souhaite pas faire de même, tant mieux. Et c’est plutôt positif que les journalistes du Monde réagissent. Oui, il faut de l’argent pour financer la presse, mais pas pour brider l’indépendance du média, voire dénaturer ce média.
Maintenant, la méthode Figaro semble lui réussir : selon les derniers chiffres de l'OJD, la diffusion France payée du Figaro a atteint en moyenne 327 544 exemplaires, en hausse de 1,56 % sur un an. Il passe en tête des quotidiens ! Mais le Monde peut peut-être suivre une autre voix et s’en sortir aussi. Dans tous les cas, le départ de Minc semble déjà un pas dans la bonne direction. Suffit de regarder ces chouettes illustrations pour s’en convaincre !

Quotidiens : Rue89 et Mediapart font bande à part !

A peine nés, les journaux en ligne que sont rue89 et Mediapart (version  pré-site pour le moment) se différencient déjà, dans le ton, la forme mais aussi dans le contenu. Ce qui mérite d’être signalé à l’heure où l’on reproche le formatage de nos quotidiens classiques. Quelles sont les différences que j’ai relevées ?
Chez les anciens de Libé, le contenu est très réactif, très imagé (beaucoup de photos) et fait la part belle à l’inventivité quant à la forme. Tout est bon pour animer cette rue89. Par un concours : un jeu vient ainsi d’être lancé sur le thème du développement durable. (J’aimerais d’ailleurs y participer, je cherche encore l’idée magique ! ). En faisant cela, le site d’information fait d’une pierre deux coups : il anime son site et obtient de la matière première gratuite,  c’est-à-dire des papiers à publier.
Deuxième trouvaille de rue89 : le blog du Poulpe. Le temps d’un écrit, le site vous propose de vous faire passer pour ce personnage de fiction, et d’écrire votre billet d’humeur. Une idée on ne peut plus interactive !
Du côté de Mediapart, on ne reste pas inactif. S’agissant du fond, j’ai remarqué les papiers « repères ». C’est mon jargon là. En fait, sur un sujet comme celui de la suppression de la pub télé sur les chaînes publiques, le site revient aux sources du phénomène et relate tout l’historique (De Pompidou à Jospin, en passant par Trautmann…), le tout agrémenté de documents inédits.
S’agissant de la forme,  Mediapart multiplie les rencontres sur le terrain. Voici quelques thèmes de tables-ronde passées  : « Presse : l’indépendance en question », « Comment les médias travaillent en banlieue »,  Medias et Europe, les difficultés d’informer ». Du sérieux, mais c’est aussi ça la marque de fabrique du site.
Des différences au final qui font que dans un cas comme dans l’autre, le lecteur identifie de suite sur quel journal il se trouve et à quelle source d’infos il a accès. Des deux côtés, les idées apparaissent et c’est très bien comme ça.